Justine

Je suis une femme trans. Je parle de mon vécu.

On veut des enfants et ça m’angoisse


Contenu sensible : PMA, enfants, système médical

Avoir des enfants, j’en ai toujours rêvé ! Je veux être maman.

Ma transition a compliqué les choses. Avec mon traitement hormonal, je suis devenue infertile. Alors, avant de commencer, je suis passée par un centre PMA.

Aujourd’hui, les lois sur la procréation médicalement assistée excluent les personnes trans. Quand j’y suis allé, la spécialiste m’a clairement, dit :

Quand vous souhaiterez avoir des enfants, vous devrez nous prouver que vous êtes toujours un homme. Parce que sinon, vous seriez considérées comme un couple homosexuel. Et selon la loi, le donneur doit obligatoirement être anonyme.

Mais je ne suis pas un simple donneur. On veut juste être maman et avoir le droit d’être les parents biologiques. C’est là le vide juridique qui exclut les personnes trans. La loi ne considère pas qu’une femme puisse avoir des spermatozoïdes ou qu’un homme puisse tomber enceint. Ce n’est pas clair si cela est maintenant possible avec l’entrée en vigueur du mariage pour tous en 2022. Mais je préfère ne prendre aucun risque.

Alors officiellement je reste un homme… avec toutes les conséquences que cela peut avoir…

Par exemple, nous sommes aussi contraintes de nous marier pour avoir droit à la PMA. Non, 13 ans de vie commune ne suffisent pas. Mais moi je veux être sa femme, et non son mari. Ça me rend tellement triste. J’ai l’impression qu’on me vole un moment précieux de ma vie.

Vous me direz: Mais ne t’en fais pas, ce n’est que sur le papier.

Non ! Ça reste pesant au quotidien. C’est pesant de recevoir du courrier de l’état au nom de « Monsieur Justine ». C’est pesant de se faire outer tous les jours quand je montre mon abonnement de train. C’est pesant de devoir expliquer aux potentiels employeurs pourquoi il est écrit « Monsieur » sur mes diplômes.

J’angoisse aussi pour le futur. Que se passera-t-il pendant la grossesse ? Est-ce que je vais subir de la transphobie ou de l’homophobie de la part du système médical ? Vais-je me faire exclure à un moment crucial comme l’accouchement, car on ne me considèrera pas comme sa compagne ?

Il y a encore tant de questions. Mais même si ça me fait peur, j’ai hâte de pouvoir serrer dans mes bras nos enfants.


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