Justine

Je suis une femme trans. Je parle de mon vécu.

Feu papa !


Contenu sensible : Alcool, Violence, Arme à feu

Non, mon papa n’est pas mort. Mais durant cette nuit, la confiance que j’avais en lui, oui.

C’était toujours lui qui conduisait. Pourtant ce soir là, à contrecœur, il s’assit à la place passager.

À chaque fois que ma mère prenait le volant avec lui, il la rabaissait. C’était l’excuse parfaite. Mais de toute façon, il n’attendait que ça… le moindre faux pas pour nous traiter comme de la merde.

Il faisait nuit, nous rentrions d’une fête de famille. C’était couru d’avance, mon père ne tenait plus très droit. Ma mère et ma tante avaient réussi à subtiliser les clés de la voiture. Hors de question qu’il conduise dans cet état !

Je ne l’avais jamais vu dans une telle fureur ! Mon père était hors de lui. La violence des insultes qu’il jetait sur ma mère était insupportable. Je me souviens qu’en pleine route, il ouvrit la portière et décida de rentrer à pied. Oui, c’est ça, casse-toi ! C’était une bonne idée, ça t’aurait pris la nuit pour rentrer et dégriser.

Je me rappelle que nous l’avons rattrapé. Mais ce ne doit pas être ça. Nous avons dû faire demi-tour pour aller le chercher. Maman, tu es beaucoup trop gentil, c’est ton plus grand défaut.

C’était éprouvant, et arrivé à la maison, ma sœur et moi sommes rapidement allées nous coucher.

Mais les engueulades m’empêchèrent de dormir. La discussion s’envenima. Mon cœur battait, de plus en plus fort. Je compris rapidement qu’il était question d’une arme à feu.

C’est à ce moment-là, terrorisée sous ma couette, que j’ai appris que nous avions un flingue à la maison. Mon père l’avait sorti et voulait aller tirer… dans la forêt… pour se calmer… C’est ce qu’on m’a raconté, mais je n’y ai jamais cru.

Ma mère avait réussi à cacher les balles et refusait de les lui donner. Il criait, elle pleurait, moi aussi.

La suite… je ne m’en souviens plus.

J’avais 12 ans. Se souvenir me hante encore aujourd’hui.


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